Dans le cadre du Synode sur la synodalité,
une série de réflexions sur l’autorité dans l’Église,
réflexions que John Wijngaards nous invite à poursuivre.
1- L’autorité? Oui mais…2 – Le pouvoir d’annoncer le royaume de Dieu3 – Le pouvoir des clés 4 – Le pouvoir de lier ou de délier 5 – Le pouvoir de pardonner les péchés6 – Le pouvoir de sauver des vies7 – Le pouvoir de chasser les démons intérieurs8 – Le pouvoir de libération 9 – Pas de domination masculine10 – L’autorité des enseignants 11 – L’autorité des prophètes
12 – L’autorité spirituelle latente partagée par tous
Prenant la parole, Jean lui dit : « Maître, nous avons vu quelqu’un qui chassait les démons en ton nom et nous avons cherché à l’empêcher, parce qu’il ne te suit pas avec nous. » Mais Jésus dit : « Ne l’empêchez pas, car celui qui n’est pas contre vous est pour vous. » (Luc 9,49-50) _TO
Ne vous inquiétez pas! S’il se fait déchiqueter par le lion, je peux entendre sa dernière confession.
En 1991, je me suis rendu à Rio de Janeiro, au Brésil, dans le cadre d’une production vidéo. Nous filmions une histoire qui ferait partie de la série de vidéos « WALKING ON WATER » (marcher sur l’eau) destinée à la formation à la foi des adultes.
Je séjournais dans un monastère. J’y ai rencontré une religieuse que j’appellerai Amelia. Elle exerçait le ministère d’aumônière d’hôpital et m’a parlé de son travail.
« Parfois, j’entends la confession d’un patient et je lui pardonne ses péchés », m’a-t-elle dit.
« C’est très bien! ai-je dit. Mais qu’en pense votre évêque? »
« Il est d’accord, dit-elle. Tout a commencé ainsi. Un jour, je me trouvais dans le service des urgences d’un grand hôpital lorsqu’un jeune homme y a été transporté. Sa moto était entrée en collision avec une voiture. Il avait les deux jambes cassées et, apparemment, il souffrait également d’une hémorragie interne au niveau de l’estomac. Une infirmière m’a dit qu’ils ne s’attendaient pas à ce qu’il survive longtemps… ».
Je me suis approchée de son lit. Quand il m’a vu, il m’a serré la main et a murmuré : « Je dois me confesser ».
J’étais sous le choc. Je me suis rendu compte que je ne pourrais jamais appeler un prêtre à temps. Que faire? Je me suis alors souvenu que, dans le passé, même des chrétiens ordinaires avaient entendu la confession d’autres personnes… J’ai donc pris une décision courageuse. Je lui ai dit : « Je peux entendre ta confession ». Il m’a fait confiance. J’ai entendu sa confession et lui ai donné l’absolution. Ensuite, je lui ai donné la sainte communion que je porte toujours sur moi.
« Magnifique! ai-je dit. Et votre évêque? »
« Oui, c’était aussi mon inquiétude. Avais-je fait ce qu’il fallait? J’ai donc expliqué à notre évêque auxiliaire local ce que j’avais fait. C’est un homme âgé qui a beaucoup d’expérience. Il m’a dit : ‘’Laissez-moi faire. Je dois consulter quelques personnes’’. Lorsque je l’ai revu quelques jours plus tard, il m’a dit : ‘’Vous avez fait ce qu’il fallait. Allez-y. Écoutez les confessions de vos patients quand c’est urgent’’. Et c’est ce que je fais. »
Le pouvoir spirituel des non-ordonnés?
La pratique du sacrement de pénitence [réconciliation] a connu une histoire longue et complexe. Au cours des premiers siècles du christianisme, le pardon des péchés n’était pas réservé aux évêques ou aux prêtres. « Confessez vos péchés les uns aux autres », prescrivait l’apôtre Jacques (Lettre de Jacques).
La tradition raconte que les chrétiens enfermés dans les prisons pendant les persécutions romaines entendaient les confessions de leurs compagnons. Et même si, au début du Moyen Âge, l’absolution des péchés était généralement réservée aux prêtres, les chevaliers blessés au combat pendant les croisades confessaient leurs péchés à leurs camarades lorsqu’aucun prêtre n’était présent. La formule d’absolution utilisée était la suivante : « Je vous absous de vos péchés avec le pouvoir que Dieu m’a donné ».
À cette époque, des facteurs culturels sont venus brouiller les cartes. Le problème est que, selon la mentalité romaine, on considérait que les péchés n’étaient pas tant une offense à Dieu qu’une offense à la loi. Cette façon de voir a été renforcée par la pensée féodale du Moyen-Âge.
Jésus a-t-il limité l’autorité aux ministres ordonnés?
Il ne fait aucun doute que Jésus a confié aux douze apôtres un ministère particulier, doté de pouvoirs spirituels spécifiques. L’Église primitive, dès la mort et la résurrection de Jésus, a suivi son exemple. Elle a établi des « anciens » dans chaque communauté, des « presbytres » = « prêtres », et des « surveillants », des « episcopoi » = « évêques », pour coordonner des régions plus vastes. Ces ministres exerçaient une autorité spirituelle. Mais cette autorité était-elle limitée à eux seuls? Était-ce là l’intention de Jésus?
Non, ce n’est pas le cas. Par exemple, le premier pouvoir que Jésus a donné aux Douze était de chasser les démons. « Jésus leur donna autorité sur les esprits impurs, pour qu’ils les chassent et qu’ils guérissent toute maladie et toute infirmité. » (Matthieu 10, 1). Mais lorsque l’apôtre Jean se plaint à Jésus qu’un simple disciple chasse les démons au nom de Jésus, celui-ci lui répond : « Ne l’empêchez pas, car celui qui n’est pas contre vous est pour vous. » (Luc 9, 50). En d’autres termes, le fait que l’expulsion des démons soit un pouvoir spécifiquement confié aux Douze n’implique pas que les autres disciples n’aient pas intrinsèquement ce même pouvoir.
En ce qui concerne le pardon des péchés, remarquez que lorsque Jésus après la résurrection a explicitement conféré ce pouvoir, des disciples ordinaires étaient également présents. Après avoir mentionné explicitement Marie de Magdala (Jean 20, 18), le texte dit : « Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des autorités juives, Jésus vint, il se tint au milieu d’eux et il leur dit : « La paix soit avec vous ». » (Jean 20, 19) Il n’est pas précisé que les paroles suivantes : « ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. » n’aient été adressées qu’aux douze (Jean 20, 21-23).Tout le monde y était inclus d’une manière ou d’une autre. Dans le passage spécial qui suit, Thomas, aussi connu sous le nom de Didyme, lequel n’était pas avec les disciples lorsque Jésus vint, est désigné comme l’un des Douze. (Jean 20, 24)
Il en va de même pour la présidence de l’eucharistie. Lorsque Jésus lors de la dernière Cène a dit « Faites cela en mémoire de moi », d’autres disciples étaient présents. En effet, il s’agissait du repas pascal auquel sa famille proche et ses amis,y compris les femmes devaient participer. (Luc 22, 15). C’est aussi ce qu’implique le fait que « Mangez ceci » « Buvez ceci » a toujours été compris comme s’adressant à tous les fidèles. Saint Paul associe lui aussi la consécration et la communion dans le commandement « Faites ceci en mémoire de moi ». Le Seigneur Jésus prit du pain, « et après avoir rendu grâce, il le rompit et dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous, faites cela en mémoire de moi » De même, après le repas, il a pris la coupe, en disant : « Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang; faites ceci en mémoire de moi chaque fois que vous la boirez. » » (1 Corinthiens 11, 24-25)
Cela signifie que la phrase de Jésus « Faites ceci en mémoire de moi » s’adresse à tous ses disciples. En principe, tous sont habilités à présider l’eucharistie. Oui, normalement ce sont les « anciens » ou les « surveillants » qui président, mais s’ils ne sont pas présents, tout membre qualifié de la communauté peut et devrait remplir cette fonction.
Questions
Pourquoi les responsables ecclésiastiques n’informent-ils pas les fidèles que, dans des circonstances particulières où aucun prêtre n’est présent, tout membre qualifié de la communauté peut présider l’eucharistie?
Pourquoi les agents et agentes de pastorale des hôpitaux et des prisons n’apprennent-ils pas systématiquement que, dans des circonstances particulières, ils peuvent eux aussi entendre les confessions et absoudre les personnes de leurs péchés?
Texte : John Wijngaards; caricatures : Tom Adcock
Le 21 mars 2023
Publié en collaboration avec le Wijngaards Institute for Catholic Research [WICR] [Institut de recherche catholique Wijngaards]
© the Wijngaards Institute for Catholic Research
Traduction réalisée par Pauline Jacob et Michel Goudreau à partir de la version gratuite du traducteur DeepL.
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