La portée de la tradition dans le débat sur le partenariat entre chrétiens et chrétiennes dans l’Église

Herve LegrandCe bref exposé comportera trois parties, selon un plan très simple. On commencera par une brève mais nécessaire exploration historique de la manière dont les chrétiens se sont expliqué à eux-mêmes les différences hommes–femmes dans leur espace social et religieux. Sans ce regard historique minimal, on court un double danger : ou bien on sacralisera des formes historiques passées en leur accordant une dignité de traditions qu’elles ne sauraient avoir légitimement; ou bien, l’on éprouvera gêne et peut-être même culpabilité, fort mal à propos, vis-à-vis notre histoire chrétienne qui ne mérite ni cet excès d’honneur, ni cet excès d’indignité[1]. En ce domaine, comme en beaucoup d’autres, l’histoire, comme Jean XXIII aimait à le répéter, est « maîtresse de vérité » et, partant, facteur de libération dans notre présent.

Ensuite, suivra une réflexion théorique. Elle essaiera de montrer le plus clairement possible que la tradition au sens théologique n’est pas et ne peut pas être l’histoire de l’Église; elle essaiera donc de préciser ce qu’est la tradition comme contenu et comme processus.

Au terme de cet exposé, on verra comment la tradition, qui a une dimension eschatologique, loin d’être synonyme de répétition, est exigence de créativité, et l’on s’efforcera d’en fournir quelques critères.

L’HISTOIRE : L’APPRÉHENSION DES RELATIONS
ENTRE HOMMES ET FEMMES DANS L’OCCIDENT CHRÉTIEN

Avant de commencer, il nous faut une définition opérationnelle du terme partenariat pour être au clair avec les termes des débats du passé et du présent. Le partenariat – dans le jeu, les affaires ou l’existence – est d’abord une solidarité dans l’action, où chacun ajuste son rôle et son agir au bénéfice de l’autre, autant dire de lui-même, puisque les résultats de l’action, pertes et profits, seront communs. Le partenariat n’exige pas l’égalité des partenaires quant à leurs moyens (ainsi dans les investissements initiaux dans une affaire, pourtant menée en partenariat, peuvent différer), ou quant à leurs performances ou leur statut; mais le partenariat exige souplesse dans la répartition des rôles : chacun pouvant engager l’autre, et s’engageant avec lui dans une solidarité positive inconditionnelle, au moins en ce qui concerne l’objet du partenariat. Si ces conditions ne se vérifient pas, on est en présence, non pas de partenaires, mais de subordonnés ou d’employés par rapport à un chef d’entreprise.

Comme dans toutes les cultures humaines, les chrétiens et les chrétiennes ont été bien entendu des partenaires au cours de l’histoire de l’Église : ce qu’il convient de préciser, c’est la figure prise concrètement par ce partenariat.

On ne connaît, en effet, aucune culture qui ne se fonde sur la différence entre hommes et femmes, quoique ces différences puissent être très diversement distribuées selon les contextes. L’ethnologie nous réserve de grandes surprises à ce sujet[2].

Si nous en venons au cas particulier des cultures chrétiennes, on constate que, tout au cours de son histoire, l’Église a tenu un double langage sur les femmes, au sens précis où l’on y trouve en même temps un oui sans réserve à l’égalité entre hommes et femmes devant Dieu, ce qui amènera à une indubitable promotion des femmes dans les sociétés que le christianisme a influencées, et en même temps une réticence à l’égalité entre hommes et femmes dans la famille et la société. Ce qui paraît d’abord une énigme irritante se dissipe si nous comprenons que le christianisme est né et a dû traverser jusqu’à nos jours des sociétés qui toutes étaient androcentriques. L’androcentrisme est un système de représentations et de valeurs dans lequel les femmes sont toujours définies comme relatives aux hommes, sans que la réciproque soit vraie au même degré. Le christianisme a donc dû faire son chemin dans des cultures où les hommes ne sont jamais définis comme relatifs aux femmes, parce que l’homme est vu comme le référent central de l’humanité. La première tâche qui s’impose à nous est donc de comprendre pourquoi et comment pendant tant de siècles le christianisme a considéré les femmes, tantôt comme les égales de l’homme, tantôt comme leurs subordonnées. Pour trouver les clefs de cette équivalence et de cette subordination, nous détournant des esprits médiocres, nous allons interroger les deux plus grands esprits de l’Occident chrétien[3] : saint Augustin et saint Thomas d’Aquin[4].

Saint Augustin et les récits de la création

Saint Augustin se trouvait face à deux récits de la création, dont il ignorait qu’ils représentaient deux traditions différentes, comme nous le savons depuis le XIXe siècle[5]. Gn 1, 27 exprime une véritable équivalence entre hommes et femmes : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. » Mais selon le récit du chapitre 2, Dieu créa d’abord Adam de la glaise du sol (v. 7) et peu après il lui adjoint Ève (vv. 18-24) : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Il faut que je lui fasse une aide qui lui soit assortie […]. Il prit une de ses côtes, referma la chair et de la côte qu’il avait tirée de l’homme, Dieu façonna une femme. » De ces récits, Augustin tirera trois conséquences : la finalité auxiliaire d’Ève, sa position subordonnée et néanmoins son équivalence avec Adam.

Ève auxiliaire

Dieu veut donc donner une aide à Adam. Mais dans quel but? se demande Augustin. À la lumière de la Gn 1, 28 (« Dieu les bénit : soyez féconds, multipliez-vous et emplissez la terre »), il répond qu’Ève est créée pour aider Adam à procréer : telle est sa finalité auxiliaire. Aucun doute à ce sujet. Ève pourrait-elle avoir été créée pour aider Adam dans son travail? Sûrement pas, il y aurait été bien mieux aidé par un autre homme, répond-il. Lui serait-elle donnée comme compagne dans sa solitude? Selon le contexte culturel de l’époque, il répond que non avec conviction : « Dans sa solitude un autre homme l’aurait bien mieux soulagé qu’une femme; deux amis conviennent bien plus parfaitement pour vivre ensemble et parler l’un avec l’autre que l’homme et la femme[6]. » D’ailleurs, « sans cette nécessité de la procréation, Dieu aurait pu créer de la côte d’Adam un autre homme aussi bien qu’une femme[7] ».

Ève subordonnée

Ève provient de la côte d’Adam, au sens littéral, selon les ressources de l’exégèse de l’époque. Ce fait interprété symboliquement, indique bien la subordination d’Ève, formée après lui, à partir de lui, et pour lui, autant de raisons pour qu’elle lui soit subordonnée. Son rôle dans la procréation est également secondaire selon la biologie de l’époque : elle reçoit la semence d’Adam dans une sorte de couveuse, l’humanité entière dérivant du seul Adam et non de nos deux premiers parents. Il faut se souvenir que la première description de l’embryologie humaine remonte seulement à 1850-1885, avec les travaux de His!

Ève équivalente

Cependant si Ève reçoit son corps d’Adam, elle ne reçoit pas son âme par son intermédiaire. Elle la reçoit directement de Dieu[8]. Comme Adam, elle possède une âme rationnelle, équivalente à la sienne; à vrai dire, ce n’est pas aussi vrai de toutes ses capacités naturelles, car la raison des femmes est, selon Augustin, inférieure à celle des hommes[9]. Mais l’égalité est assurée dans les capacités surnaturelles.

Équivalence et subordination : la clef d’un double discours

Ainsi Ève est l’équivalente d’Adam quant à son âme; c’est seulement dans sa condition charnelle, en tant que femme, qu’elle lui est subordonnée : étant son aide dans la procréation, elle y joue un rôle inférieur puisque c’est le père qui engendre l’enfant; étant son aide dans la vie sociale, elle lui est également subordonnée à cause de sa faiblesse physique comme de sa faiblesse psychique. Augustin en conclut : « Selon l’ordre de la nature, il convient que la femme soit au service de l’homme, car ce n’est que justice que le moins doué serve le plus doué[10]. » Cette conception influencera l’ensemble de l’Occident jusqu’au XXe siècle, car elle passera dans le décret de Gratien, sous forme de citation, légitimant ainsi le statut juridique subordonné des femmes dans le droit canonique[11].

Concluons ce survol de saint Augustin par deux remarques utiles à notre propos.

On voit bien ainsi la constitution de cette attitude paradoxale qui est à l’origine de la position des femmes en christianisme : hommes et femmes sont équivalents spirituellement et, en même temps, sur le registre biologique et social, on maintient une différence sur le mode de l’inégalité; on dit donc un non à la promotion des femmes.

On voit également que si le partenariat n’est pas exclu dans le christianisme traditionnel, il n’est pas celui de notre attente moderne, car ce partenariat exclut, d’une part, la souplesse dans la répartition des rôles et, d’autre part, la possibilité même qu’une femme se substitue pleinement à un homme dans bien des rôles sociaux, comme on va le voir avec saint Thomas d’Aquin.

Saint Thomas d’Aquin

Saint Thomas étant le docteur commun de l’Église, il conviendrait de lui prêter une particulière attention. On devra pourtant se borner ici à parcourir la Somme théologique : on vérifiera ainsi qu’il opère avec les mêmes catégories androcentriques qu’Augustin.

Androcentrisme

Comme pour Augustin, la finalité de la femme est d’être une auxiliaire de la procréation (Ia, q. 92, a, 1). De cette manière, l’homme est libéré pour les activités intellectuelles : « L’homme, lui, est ordonné à une activité vitale encore plus noble, à savoir la connaissance intellectuelle, et c’est pourquoi dans l’homme il y avait une raison plus forte de distinguer ces deux vertus et de produire la femme à l’écart du mâle tout en les unissant charnellement pour l’œuvre de la procréation » (Ia, q. 92, a. 1).

Infériorité physique et intellectuelle de la femme

Tout le monde connaît l’expression de saint Thomas, reprise à la meilleure biologie de son temps, qu’il connaissait à travers Aristote et saint Albert son maître, selon laquelle la femme est quelque chose de défectueux (mas occasionatum, Ia, q. 92, a. 1, ad 1um), mais on connaît moins les fondements qu’il donne à la subordination des femmes aux hommes : « La femme est par nature soumise à l’homme, car l’homme jouit avec plus d’abondance du discernement de la raison » (Ia, q. 92, a. 1, ad 2um); ce qui a pour conséquence une comparaison intolérable pour nous modernes : « À cause de la déficience de leur raison, on ne recevra pas le témoignage des femmes devant les tribunaux, pas plus qu’on ne reçoit celui des enfants et des fous » (Ia IIa oe, q. 70, a. 3).

Telle est également la raison pour laquelle il croit impossible que les chrétiennes puissent être ordonnées – elles sont dans un statut de subordination par rapport aux hommes (toutes les femmes par rapport à tous les hommes). Or, un ministre de l’Église ne peut être dans un état de subordination, il doit y avoir en lui une certaine éminence qui fait défaut à la femme. Ainsi, si un évêque ordonnait, par erreur, un esclave et une femme, seul l’esclave serait validement ordonné, parce qu’il est esclave par accident, tandis que la femme ne le serait pas, étant assujettie par nature (IV Sent., d. 25 q. 2, a. 2, ad 4um; Éd. De Parme, p. 908-909).

Équivalence

Cependant au plan de son statut personnel, pour saint Thomas comme pour saint Augustin, la femme est l’équivalente de l’homme : le salut chrétien libère la femme de sa sujétion naturelle. On retrouve ici la même clé du oui et du non simultanés aux femmes.

Le but de ce bref parcours historique n’était pas, grâce à quelques citations bien choisies, de provoquer une vertueuse indignation ou de tourner en ridicule le docteur commun de l’Église, mais de faire percevoir, si besoin était, l’épaisseur historique de notre problème. Aussi géniaux furent-ils, aussi saints furent-ils, ni Augustin ni Thomas d’Aquin n’ont transcendé la culture de leur époque où tous, les génies comme les esprits les plus médiocres, les femmes comme les hommes, ont partagé cette même anthropologie.

Ève et Marie

Une information historique est encore nécessaire avant de passer à la réflexion théologique. En effet, on pourrait objecter : « Est-il possible de faire silence sur le fait que la véritable image de la femme à ces époques est celle de la Vierge Marie? » Il faut ajouter, en effet, que les catégories androcentriques vont encore jouer un rôle dans la compréhension de l’histoire du salut, dans la chute et la Rédemption; là, on retrouve dans le Nouvel Adam (le Christ) et la Nouvelle Ève (Marie), en parallèle avec Adam et Ève.

La chute

L’androcentrisme, que l’on a vu à l’œuvre dans la compréhension de la création, joue aussi comme grille d’interprétation de la chute de nos premiers parents : le péché s’empare d’Adam par l’intermédiaire de sa femme; celle-ci se laisse séduire consciemment (puisqu’elle rappelle l’interdiction au serpent) et entraîne son mari[12]. Sa punition, dans la ligne de l’androcentrisme, sera donc plus grave : alors qu’Adam voit seulement s’aggraver la peine liée au travail nécessaire pour nourrir les siens, elle sera frappée dans son rôle d’auxiliaire, dans la domination de son mari sur elle et la douleur de l’enfantement[13].

La Rédemption

De même que dans la chute il y a un pôle masculin et un pôle féminin, de même dans la Rédemption. L’élément principal et masculin est le Christ, le Nouvel Adam; l’élément secondaire et féminin est Marie, la Nouvelle Ève. Mais ici une question sérieuse doit être posée à la tradition des commentateurs, sans dévaloriser le thème paulinien du Nouvel Adam ou le thème patristique de la Nouvelle Ève : parle-t-on vraiment de la Rédemption en développant ce parallélisme (parfois assez loin : Marie « médiatrice », « corédemptrice »), ou bien se trouve-t-on devant la projection de la bipolarité humaine, si prégnante dans notre condition, là où elle n’a que faire? Laissons cette question à la libre discussion, mais non pas celle-ci : cette manière de circonscrire le destin féminin entre les deux figures d’Ève et de Marie ne permet-elle pas de situer les femmes réelles à la fois très haut, sur un piédestal (la Vierge Marie), et très bas, comme instrument de perdition (Ève)? N’est-ce pas là une manière pour les hommes d’échapper au partenariat avec les femmes réelles? Ces dernières ne sont ni des « Sainte Vierge » ni des instruments de perdition. Elles sont tout simplement aussi humaines que les hommes, aussi ambivalentes, ni meilleures ni pires. Et bien loin que la femme soit capable de « tout perdre ou de tout sauver », dans un mariage c’est l’un et l’autre qui perdent ou sauvent ensemble leur vie de couple.

Oui, l’histoire chrétienne, à travers une certaine spiritualité, une certaine prédication, a pu véhiculer non seulement l’androcentrisme mais la sacralisation, la plupart du temps inconsciente, de l’ambivalence des hommes à l’égard des femmes.

Mais une telle remarque ne donnerait-elle pas raison aux féministes les plus radicales selon lesquelles l’histoire chrétienne a rigidifié les relations entre hommes et femmes et s’en trouve dévalorisée? Théologiquement non, car on doit être attentif au fait que l’histoire des chrétiens ne peut pas être confondue avec la tradition chrétienne. Il faut absolument clarifier ce point avant de se tourner vers le présent et l’avenir.

LA TRADITION N’EST PAS L’HISTOIRE DES CHRÉTIENS

L’histoire change

Sans être historien, on peut appréhender ce qu’est l’histoire en se référant au seul dernier demi-siècle, au cours duquel la figure des relations entre hommes et femmes a profondément changé. Les idées ne mènent pas le monde : ces relations n’ont pas tant changé à cause du féminisme qu’à cause des facteurs beaucoup plus objectifs, largement non idéologiques, comme les progrès de la médecine et du travail salarié des femmes dans les sociétés postindustrielles. Ce sont ces progrès qui ont permis au féminisme d’avoir l’écho qu’il a eu et non l’inverse.

Voyons de plus près. En cinquante ans, les progrès de la médecine ont permis de maîtriser la mortalité des femmes en couches et celle des nourrissons. Pensons qu’elle est encore de 458‰ dans telle région d’Afrique Occidentale. Ils ont permis également l’exercice d’une paternité responsable. Aujourd’hui, il suffit d’avoir deux ou trois enfants, et on est sûr de les conserver. Ainsi, l’Européenne type aura 32 ans lorsqu’elle mettra son dernier enfant à l’école maternelle. Comme la médecine va la faire vivre jusqu’à 81 ans et 3 mois en moyenne, si elle est française (tandis que son mari n’aura que 73 ans), comment ne voudrait-elle pas travailler?

Tel est le deuxième levier historique : le travail salarié des femmes introduit leur indépendance financière par rapport à leur mari et, en même temps, l’élargissement de leurs relations sociales au-delà du réseau familial, et d’abord la nécessité de partager les tâches ménagères et éducatives au sein du foyer.

Qu’en résulte-t-il? Les femmes, mariées ou célibataires, vont se sentir de plus en plus partenaires des hommes et non dépendantes d’eux. L’instauration d’un nouvel équilibre, social et psychologique, entre hommes et femmes s’ensuit; de nouvelles valeurs naissent : quasi nécessairement celles du partenariat, sans quoi le foyer deviendra trop fragile. L’histoire change ainsi, non à partir des idées, mais à partir de l’histoire biologique de l’être humain et de son histoire économique. La biologie et l’économie font l’histoire réelle. C’en est fini de cet univers, social et mental, dans lequel les femmes étaient relatives aux hommes, sans que la réciproque soit vraie au même degré. C’en est fini de l’androcentrisme qui met l’être masculin au centre; un nouveau monde, où l’existence réellement humaine est conçue comme un partenariat en réciprocité entre hommes et femmes, naît peu à peu, non pas sans tâtonnements, ni sans douleurs, ni sans échecs (fragilité du mariage en particulier).

La tradition : un ferment, non un modèle

Que nous soyons chrétiens ou non, nous sommes des pionniers dans ce nouveau monde. Ce ne sont pas les modèles élaborés par Augustin et Thomas d’Aquin dans une culture si étrangère à la nôtre qui pourront y servir de critères. D’ailleurs, l’histoire de l’Église n’est pas la tradition : aucun théologien n’a jamais soutenu cela. La Tradition est un concept théologique beaucoup plus précis et plus retreint. On peut en trouver une définition indiscutable dans un manuel de théologie, qui a pour auteur un prélat allemand, Mgr Bartmann :

La tradition divine remonte soit à la « bouche du Christ », soit « aux communications du Saint-Esprit faites aux apôtres après l’Ascension du Seigneur » […] seule la tradition divine est source dogmatique; tout ce qui est d’origine humaine, même si on peut le faire remonter aux Apôtres en tant que chefs et organisateurs de l’Église (traditio mere apostolica) ou bien aux chefs postérieurs de l’Église (traditio ecclesiastica) n’entre pas en ligne de compte, quelle que soit l’importance de cette tradition pour la discipline, le culte et le droit […]. Aussi nous comprenons sous le nom de tradition dogmatique les vérités que les Apôtres ont reçues du Christ ou du Saint-Esprit et que l’Église, depuis ce temps, a transmis sans altération[14].

Dans les évangiles, Jésus s’est adressé aux femmes comme à des êtres humains à part entière. Il les a souvent prises en exemple de la condition humaine, comme dans ses paraboles. Rien ne laisse entendre, dans ses paroles, que l’appartenance au sexe féminin serait un cas plus particulier d’humanité que l’appartenance au sexe masculin; aucune allusion n’est faite à la figure d’Ève. Surtout, dans son attitude envers les femmes, il s’est franchement démarqué de ses contemporains. Il a inclus des femmes parmi ses disciples (Lc 8, 1-13; Mt 27, 55; Mc 15, 41); il leur parlait en public, ce qu’un Juif pieux ne se permettait pas. L’épisode de la femme adultère est dans toutes les mémoires. Les quatre évangiles notent, de façon concordante, que Jésus a pris comme premiers témoins de sa Résurrection des femmes, alors même que leur témoignage était légalement invalide, et il les envoie « à tous les frères ».

De plus, Jésus a relevé leur statut à l’égal de celui de l’homme dans le mariage, au point que les disciples s’exclament que, dans ce cas, « mieux vaut ne pas se marier » (Mt 19, 10) : interdiction de la polygamie; sanction identique pour l’adultère de l’homme et de la femme; libre choix de l’époux; indissolubilité du mariage; singulière sécurité pour les femmes âgées ou sans enfants; enfin liberté de ne pas se marier.

Certes, aujourd’hui, on laisse entendre que le choix qu’il a fait des Douze serait un choix d’hommes à l’exclusion délibérée des femmes disciples; c’est interroger l’action de Jésus à partir d’un préoccupation qui lui est étrangère : d’une part, ces douze doivent symboliser les chefs des douze tribus; quant à la mission qui serait la leur, d’autre part, la plausibilité qu’il y aurait eu à mandater des juives de cette époque pour ce type de mission ne peut pas être étayée.

Quant au patriarcalisme, Jésus en est étonnamment exempt. Jésus au temple, à 12 ans, est-il le bon fils de ses parents (Lc 2, 41-51)? Le chapitre 3 de Marc montre qu’il entre en conflit sérieux avec sa famille qui l’accuse d’être hors de sens (3, 21), ce qui l’amène à récuser les liens du sang quand les gens de sa parenté viennent le chercher : « Qui est ma mère, et qui sont mes frères? » Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi, frère, sœur et mère » (Mc 3, 31-35). Pour le suivre, il faut quitter « maison, femme, frères, parents, enfants » (Lc 18, 29-30 et par.; Mt 19, 27-29; Lc 18, 28-30). Il dit lui-même être venu apporter la division « père contre fils, fille contre mère, bru contre belle-mère » (Mt 19, 34-36; Lc 15, 51-53). Celui qui est appelé ne doit pas dire au revoir à son père (Lc 9, 61), ni même enterrer son père mort (Mt 8, 21-22; Lc 9, 50-60).

Cette radicalité antipatriarcale de Jésus explique aussi celle de Paul en Galates 3, 28 : « Il n’y a ni Juif, ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni l’homme ni la femme. » Comment donc expliquer l’attitude restrictive des écrits néo-testamentaires tardifs à l’égard des chrétiennes et la restauration de codes domestiques où l’épouse doit être soumise à son mari, comme les enfants aux parents et les esclaves à leurs maîtres? On pense généralement que c’est là une attitude apologétique et un souci missionnaire pour rassurer les païens sur les effets de la conversion des femmes et des esclaves pour gagner le respect de la société ambiante, et c’est aussi la raison de l’interdiction de tout ministère public aux chrétiennes[15]. C’est la raison pour laquelle l’auteur de la première épître à Timothée interdit aux femmes de prendre la parole en public et d’exercer l’autorité sur l’homme (2, 11-15). Dans cette interdiction, il doit se référer à la Genèse.

Pouvons-nous aujourd’hui avoir d’autres critères pour un partenariat entre chrétiens et chrétiennes dans l’Église?

LA TRADITION CHRÉTIENNE N’EST PAS RÉPÉTITION
MAIS EXIGENCE D’INNOVATION. QUELQUES CRITÈRES

Jusqu’à une date somme toute récente (moins d’un demi-siècle!), le discours sur la différence hommes et femmes avait un point fixe, le masculin instauré en référent central. Certes, quelques privilégiés avaient été en mesure d’anticiper, comme Poullain de la Barre, professeur à la Sorbonne qui, encore catholique, écrivit il y a plus de trois siècles le premier plaidoyer en faveur de l’ordination des chrétiennes « De l’égalité des deux sexes, discours physique et moral où l’on voit l’importance de se défaire des préjugés » (1673). Mais désormais c’est toute la société occidentale qui s’interroge sur ce que constitue l’être humain, à la fois masculin et féminin. Interrogation d’autant plus ouverte que la différence, supposée jusqu’alors immuable, apparaît largement historique, dans ce que l’histoire a de plus matériel (la biologie et l’économie).

La tâche n’est pas facile. On peut clairement prendre conscience que l’être humain est masculin et féminin sans hiérarchisation, comme l’expliquent remarquablement deux dictionnaires parus l’an dernier, l’un en Allemagne, l’autre en France, très érudit l’un : la Theologische Realenzyklopadie, très représentatif l’autre : le Dictionnaire du protestantisme, et pourtant ne proposer aucun article « homme », « virilité » ou « Mann », qui examinerait, soit les aptitudes religieuses spécifiques, soit les problèmes particuliers, symboliques ou éthiques, que les hommes rencontreraient dans le domaine religieux, ou dans leurs relations aux femmes. La simple incongruité, vérifiable dans ces deux dictionnaires, d’avoir un article « femme », sans un article « homme » parallèle, prouve bien que les circonstances historiques et culturelles actuelles, la femme reste « spéciale » – mais par rapport à qui dans un ensemble qui ne comportant que deux éléments? Cela va sans dire puisque l’article « homme » reste introuvable. Dans la structure du discours organisé « homme » reste le référent central, même s’il a cessé de l’être dans les énoncés particuliers!

Nous entrons donc dans un espace inexploré. Y allons-nous sans critères? Ce n’est pas le cas.

Des interrogations préalables sur la non-ordination des chrétiennes

Les chrétiennes sont actuellement exclues du sacrement de l’ordre (CIC, c. 1024), si bien qu’elles ne peuvent exercer un pouvoir de plein gouvernement dans l’Église (c. 129, § 1), ni recevoir des offices qui requièrent le pouvoir de l’ordre (c. 150). Elles ne peuvent non plus, mais c’est conditionné par ce qui précède, être instituées acolytes et lectrices (c. 230).

Deux remarques sont utiles à ce sujet.

1. Ce point n’est pas de foi définie

La dernière intervention de Jean-Paul II sur le sujet, Ordinatio Sacerdotalis (1994), est d’ordre théologique et pastoral, et non pas dogmatique au sens de la définition. Son but essentiel est de mettre un terme à la discussion publique. La Congrégation pour la doctrine de la foi a pris soin de préciser que cette intervention n’était pas infaillible :

Le pontife romain, compte tenu des circonstances actuelles, a confirmé cette doctrine dénonçant « ce qui doit être tenu toujours, partout et par tous, en tant que cela appartient au dépôt de la foi ». Dans le cas présent, un acte de magistère pontifical ordinaire, en soi non infaillible, atteste le caractère non infaillible de l’enseignement d’une doctrine déjà en possession de l’Église[16].

Ainsi donc on n’a pas affaire à une doctrine bien définie. De manière non infaillible, dans les circonstances présentes, par un acte de son magistère ordinaire, le pape rappelle que la non-ordination des femmes appartient au dépôt de la foi, aux conditions énoncées par Vincent de Lérins (ce qui est enseigné toujours, partout, par tous). Mais une plus grande finesse dans les études historiques pourrait montrer que la question qu’on se pose aujourd’hui est entièrement renouvelée, après l’effacement ou le recul de l’androcentrisme, et qu’ainsi l’unanimité du passé ne serait pas contraignante parce qu’elle répondait à une question posée en de tout autres termes.

2. L’ordination des seuls hommes n’empêche pas, à titre principiel du moins, le partenariat de se développer dans l’Église

Au plan symbolique, une atteinte est portée au partenariat idéal entre tous et toutes par cette non-ordination actuelle des chrétiennes à l’épiscopat et au presbytérat. Mais deux observations réalistes doivent être faites qui empêchent de se sentir paralysée sur ce chemin :

D’une part, même quand des chrétiennes sont ordonnées, cela n’entraîne pas automatiquement le partenariat; l’on n’a pas non plus attendu qu’il soit vérifié avant d’ordonner des chrétiennes dans les Églises protestantes. Le partenariat a bien d’autres clés et des clés plus décisives que le principe de l’appel des chrétiennes à l’ordination.

D’autre part, il faut bien voir que les femmes laïques accèdent au partenariat dans les mêmes conditions que les hommes laïques.

Autrement dit, il est probablement trop restrictif de ne donner à la faiblesse du partenariat qu’une seule cause et qu’une issue : l’absence de l’ordination des chrétiennes. Avant d’en arriver à cette ordination – mais chacun sait que l’échéance en est éloignée, si jamais on y arrive –, la tradition nous ouvre la voie en proposant divers critères; l’un est négatif, les autres positifs.

Un critère négatif

L’androcentrisme des cultures qui nous ont précédés n’a rien de spécifiquement chrétien. Il n’y a pas d’anthropologie révélée. L’infériorité de la femme (de toute femme) par rapport à l’homme (à tout homme) n’a rien à voir avec la foi chrétienne. Gaudium et Spes 9 (après Pacem in terris 41 de Jean XXIII) voit au contraire un signe des temps dans la situation nouvelle des femmes et dénonce « toute discrimination fondée sur le sexe comme contraire au dessein de Dieu » (GS 29 et 60). Jean-Paul II dans Mulieris dignitatem réaffirme ces positions, avec une particulière rigueur.

Ces prises de position invitent à reconnaître que l’Église s’est trouvée confrontée, non seulement au mal, mais aussi au péché de son histoire. Il serait trop simple d’attribuer toutes les responsabilités au contexte culturel des siècles passés ou de l’époque contemporaine. Nous sommes ainsi conviés à appeler le mal et le péché par leur nom. Bien sûr, lorsqu’on parle chrétiennement du mal et du péché, ce ne peut être qu’en annonçant en même temps la grâce, c’est-à-dire la possibilité de la conversion personnelle. Sans pouvoir nous vanter d’être meilleurs que nos pères et nos mères, reconnaissons au moins que les changements historiques, dont nous prenons la mesure en nos générations, font peser sur nous une plus grande responsabilité, à partir du moment où nous voyons ce que nous voyons et qui restait, sinon caché, du moins plus obscur aux générations précédentes.

Des critères positifs

La tradition par essence est tournée vers l’avenir.

La tradition n’est pas répétition. Comme sa désignation en grec (paradosis) et en latin (traditio) le dit bien, la tradition est une transmission qui implique traduction avec un risque de trahison. Pour transmettre fidèlement, il ne faut pas répéter, il faut traduire, jusqu’à ce que le Seigneur revienne. Autrement dit la traduction est toute tournée vers l’avenir : l’avenir historique, dans le cas présent des sociétés qui ont cessé d’être androcentriques; et l’avenir eschatologique entrevu dans Ga 3, 28 : «  Il n’y a plus ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni l’homme ni la femme. » L’eschatologie est, certes, un ferment dans l’histoire, mais elle n’est pas une utopie, c’est dire qu’elle ne donne pas de modèles fixes tout faits qu’il n’y aurait qu’à reproduire quelles que soient les circonstances. Il est éclairant de constater que le statut accordé par la société chrétienne aux Juifs et aux esclaves a connu les mêmes difficultés que celui accordé aux femmes. Tous les trois n’ont été révisés en profondeur que récemment et pour les mêmes raisons. Il en va de même pour le soutien donné à la démocratie par les chrétiens : qui voudra se scandaliser qu’au temps de Louis XIV il ne se soit pas trouvé même une poignée de militants en faveur de la démocratie chrétienne car, tout de même, liberté, égalité, fraternité sont des valeurs évangéliques! Certes, l’eschatologie chrétienne est un ferment dans tout contexte culturel et social (monarchie absolue ou démocratie), mais elle inspirera des formes chaque fois singulières.

S’il n’y a pas de modèles fixes, il n’y a pas non plus de limitations posés à ce partenariat : l’existence du ministère ordonné, loin de constituer un obstacle, représente plutôt une requête en ce sens, car l’ordination est déjà une articulation entre la responsabilité de tous et celle de quelques-uns. Innombrables en sont les attestations en provenance de la tradition : la première parole prononcée dans toute ordination est toujours une requête en provenance de l’Église adressée à l’évêque; le droit général de l’Église prévoyait l’élection d’un évêque par son Église jusqu’au Code de 1917; les listes de succession épiscopale ne s’établissent jamais selon l’imposition des mains, mais selon la succession à la tête d’une Église; et l’on pourrait continuer.

Sans doute ne peut-on pas reprendre mécaniquement aujourd’hui ces modèles du passé. Mais il est essentiel de repérer les apprentissages de partenariat que notre Église est en train de faire ou qu’elle est appelée à faire. Le plus évident est celui des équipes pastorales qui comprennent des chrétiennes et qui n’ont pas attendu le canon 517, § 2 pour se mettre en place, mais que ce dernier officialise. Il en va de même des conseils et des synodes nés dans la foulée de Vatican II et dont les réalisations, même dans le cadre du droit en vigueur, restent encore modestes. Pourtant, il y a là des perspectives qui sont également d’importance pour le rapprochement œcuménique, comme le document de Foi et Constitution Baptême Eucharistie Ministère l’a souligné (Lima 1982) en y citant déjà Lausanne 1927[17].

Ces derniers terrains d’apprentissage semblent peu spécifiques. Pourtant ils sont d’un grand réalisme : rien n’interdit et tout recommande que l’on s’engage dans cette direction. Il y a là une perspective décisive : une Église ne se réforme ni ne grandit seulement par discours ou par décrets, mais avant tout par des apprentissages qui font vivre ces valeurs mêmes, qu’on ne pourra rendre normatives avant d’avoir appris quelque peu à les pratiquer. Pourrions-nous transmettre ce que nous n’aurions pas appris?

Hervé Legrand, o.p.
Professeur à l’Institut Catholique de Paris


NOTES 

[1]  On lira avec intérêt la mise au point de Paul McKechnie, « Women’s Religion et Second-Century Christianity », Journal of Ecclesiastical History 47 (1996), 409-431; il démontre le parti-pris non fondé consistant à exalter les écrits gnostiques par rapport aux écrits canoniques. Il y a d’autres lectures biaisées de l’histoire de l’Église.

[2]  On peut voir les classiques de Margaret Mead, Sex and temperament in three primitive societies, New York, 1935, et Male and female, New York, 1948 (tr. Fr., L’un et l’autre sexe. Les rôles d’homme et de femme dans la société, Paris, 1966). Ou, tout récemment, Françoise Héritier, Masculin/féminin. La pensée de la différence, Paris, Odile Jacob, 1966, où le premier et le dernier essai sont particulièrement éclairants.

[3]  L’Orient byzantin fait preuve du même androcentrisme, cf. Joëlle Beaucamp, Le statut de la femme à Byzance (IVe-VIIe s.), Paris, de Boccard, t.I, 1990; t. II, 1992.

[4]  On en trouve une étude remarquablement claire dans l’ouvrage classique de Kari E. BØrresen, Subordination et équivalence. Nature et rôle de la femme d’après Augustin et Thomas d’Aquin, Paris-Oslo, Mame-Uniniversitetsvorlaget, 1968.

[5]  H, B. Witter est le premier, au XVIIIe  siècle, à avancer l’hypothèse que le récit combinait deux sources.

[6]  Gen. Ad litt. IX, 5.CSEL. 28, 1, p. 273.

[7]  Ibid. Il en conclut donc : « Si on fait abstraction de la reproduction, je ne vois pas en quoi la femme aurait pu constituer une aide pour l’homme. »

[8]  Gen. Ad litt. X. 10.CSEL. 28, 1, p. 307.

[9]  Selon l’ordre naturel chez les êtres humains, les femmes doivent être soumises aux hommes et les enfants aux parents, car il n’est que juste que le plus faible quant à la raison soit soumis au plus fort. », quaest. In Hept.1153. CC 33, p. 59. Dans le même registre, on note une certaine hésitation chez les Pères à considérer que la femme est image de Dieu exactement au même titre que l’homme. Cf. K. E. Børresen, « Imago Dei, privilege masculine? Interprétation augustinienne et pseudo-augustinienne de Gn 1, 27 et 1 Co 11,7 », dans Augustinianum 25, 1985, p. 213-234.

[10] Cf. citation à la note précédente.

[11]  Pour l’histoire du droit canonique, cf. Ida Raming, Der Auschluss der Frau vom priesterlichen Amt. Gottgewollte Tradition oder Diskriminierung ? Eine rechtshistorisch-dogmatische Untersuchung von Kanon 968 § 1 des Codex luris Canoni, Cologne-Vienne, B hlau Verlag, 1973. La sujétion par nature de la femme à l’homme est l’argument explicite et constant justifiant l’impossibilité de l’ordonner.

[12]  « Si Adam a cédé, c’est par affection pour Ève, son unique compagne, sa semblable, son épouse. » (Augustin, Civ. Dei 11, 2. CC 48, p. 433).

[13]  Pour Augustin, il s’ensuit une aggravation et un raidissement de la subordination primitivement exigée, cf. Op. Impert. Jul, VI, 26, PL. 45, 1566.

[14]  On cite ici la traduction française (t. I, Mulhouse, p. 45) de 1935 (faite sur la 8e éd. Allemande de 1932).

[15]  C’est la thèse d’E. Schüssler Fiorenza, En mémoire d’elle, Paris, Cerf, 1986; pour une démonstration historiquement plus technique, et R. Nürnberg, « Non decet neque necessarium est, ut mulieres doceant », Ueberlegungen zum altkirchlichen Lehrverbot für  Frauen. Jahrbuch für Antike und Christentum 31, 1988, 57-73.

[16] La Documentation catholique 77, 1995, 1081.

[17]  Foi et Constitution du Conseil Œcuménique des Églises, Baptême Eucharistie Ministère. Convergence de la foi, Paris, Centurion/Presses de Taizé, 1982. Au no 26 (chapitre sur le ministère) on lit que le ministère ordonné devrait être exercé selon un mode personnel, collégial et communautaire. On développe ce point en insistant sur l’articulation de ces trois aspects, et on ajoute : « La reconnaissance de ces trois dimensions est sous-jacente à une recommandation faite par la première conférence mondiale de Foi et Constitution à Lausanne en 1927 : « Dans la constitution de l’Église primitive, on retrouve et la charge épiscopale, et les Conseils des Anciens, et la communauté des fidèles. Chacun de ces trois systèmes d’organisation ecclésiastique (épiscopalisme, presbytérianisme, congrégationalisme) a été accepté dans le passé durant des siècles, et est encore pratiqué aujourd’hui par d’importantes fractions de la chrétienté. Chacun d’eux est considéré par ces tenants comme essentiel au bon ordre de l’Église. En conséquence, nous estimons que, sous certaines conditions à préciser, ils devront prendre simultanément leur place respective dans l’organisation de l’Église réunie. » »


Tiré de Pleins feux sur le partenariat en Église * Actes du symposium * Le partenariat hommes et femmes en Église (p. 105-123). Montréal, Éditions Paulines, 1997.

A propos Hervé Legrand

Hervé Legrand est un prêtre dominicain français spécialisé dans le domaine de l'œcuménisme et de l'ecclésiologie. Professeur émérite à l'Institut catholique de Paris, expert au Conseil des conférences épiscopales européennes, il est assesseur à l'Académie internationale des sciences religieuses. Il participe à diverses commissions œcuméniques, en particulier la Fédération luthérienne mondiale. Il a contribué à plusieurs ouvrages collectifs.
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