La Marche mondiale des femmes 2010

Citoyenne de la ville de Québec depuis 2006, j’ai trouvé un milieu naturel d’insertion au Centre de femmes de mon quartier. Il allait de soi qu’avec les femmes d’ici,  j’allais participer à la Marche mondiale des femmes 2010, moment exceptionnel de solidarité. En l’an 2000, c’est avec les femmes de l’Outaouais que je marchais.

Ici dans la région de Québec, j’ai participé à trois des cinq journées thématiques réunissant une centaine de personnes chacune. Au Centre de femmes de mon secteur, nous étions responsables de la manifestation sur le thème de la violence et de l’exploitation sexuelle des femmes et des jeunes filles.

Le jeudi le 14 octobre, nous avions rendez-vous à la gare du Palais à 10h30, point de départ de la marche. Comme première mise en scène, nous avons assisté à une vente aux enchères de parties du corps de la femme, à l’aide d’un mannequin. A titre d’exemple, vente des épaules (tout ce que la femme peut porter sur ses épaules). Ainsi de suite, pour d’autres parties du corps. 

De la gare du Palais, le groupe s’est mis en marche en direction du Palais de justice de Québec pour une deuxième mise en scène: une occupation de quelques minutes, en silence, chaque personne portant un masque. Reprise de la marche jusqu’au parvis de l’église Saint-Roch. 

Sur les marches du parvis, une troisième mise en scène par une vingtaine de femmes revêtues de tee-shirts blancs sur lesquels on pouvait lire différents slogans. Quelques femmes enceintes. D’autres non. Dans ce lieu éminemment symbolique rappelant le rôle de l’Église face à la contraception et l’avortement, des slogans et prises de parole ont résonné revendiquant le droit pour les femmes de gérer leur maternité.

Le dimanche 17 octobre, des autobus quittaient Québec en direction de Rimouski avec une bonne participation de  femmes de notre secteur. On attendait 4000 femmes. Nous étions 10 000. Quelle réponse éloquente aux critiques entendues la semaine précédant la marche. Propos qui allaient jusqu’à remettre en question la pertinence de la Fédération des femmes du Québec.

Un événement marquant où toutes les régions du Québec étaient représentées.  Les différents groupes rivalisaient  de créativité pour manifester leur présence de façon festive dans les rues de la ville de Rimouski dont les structures d’accueil étaient exceptionnelles. Une marche d’environ cinq kilomètres. Un rendez-vous dans un immense parc pour un spectacle, des prises de parole et la présentation originale des revendications de la Marche mondiale des femmes 2010.

Ce qui m’a le plus touchée dans cet événement m’a-t-on demandé ?

Très émue par la présence de femmes africaines venues nous dire combien la solidarité des femmes québécoises était importante pour elles. Je me suis rappelé les commentaires entendus à la suite de grandes conférences internationales des femmes où les femmes du Sud nous reprochaient notre féminisme idéologique et notre peu de sensibilité à leur réalité. À Rimouski, j’ai croisé Françoise David, présente de façon très discrète. Initiatrice de la marche Du pain et des roses en 1995, nous lui devons cette grande sensibilité à la réalité vécue par les femmes d’ici et d’ailleurs.

Militante de longue date, il m’est arrivé de reprocher aux jeunes femmes d’être bénéficiaires des acquis du féminisme et de ne pas être à nos côtés pour poursuivre nos luttes.  À Québec comme à Rimouski, elles étaient là nombreuses aux activités de la marche,  quelques-unes  portant un bébé  de quelques semaines. Certaines accompagnées de leurs conjoints et de leurs enfants.

Plusieurs des revendications de la MMF  ne touchent pas seulement les femmes. Qu’on pense à celles sur la santé, sur  la pauvreté, sur l’environnement, sur  la paix et la démilitarisation. Plusieurs hommes l’ont  bien compris et nous supportent dans ces revendications. Comme nous sommes éloignés d’un féminisme perçu contre les hommes!

Un dernier aspect à souligner.  Ce rassemblement de 10 000 personnes ne témoigne-t-il pas d’une façon propre aux femmes de manifester et de faire entendre leur voix sans violence, sans casse, de manière pacifique?

Au lendemain de la MMF 2010, nous sommes toutes et tous conviéEs à l’action. Une tâche reste à poursuivre  à partir  des revendications, outil de travail qui est entre nos mains.

En conclusion, nous est-il permis d’éprouver de la fierté comme femmes d’être manifestement partie prenante d’une révolution sociale qu’on reconnaît être la plus importante des deux derniers siècles ?

Tant que toutes les femmes ne seront pas libres nous marcherons.

Octobre 2010

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