Gisèle Turcot, récipiendaire d’un doctorat « honoris causa » en sciences des religions de l’Université Laval

L’Université Laval annonce aujourd’hui la remise d’un doctorat honoris causa en sciences des religions à Gisèle Turcot, membre fondatrice du réseau Femmes et Ministères

Cette haute distinction reconnaît le rayonnement remarquable et exemplaire du parcours professionnel de Gisèle Turcot, membre de l’Institut Notre-Dame du Bon-Conseil de Montréal depuis 1958 dont elle termine un troisième mandat comme supérieure générale et vice-présidente du réseau Femmes et Ministères – Femmes et hommes pour l’égalité en Église.

Plus particulièrement, c’est l’occasion de souligner son engagement social, communautaire et féministe. À l’exemple de sa fondatrice, Marie Gérin-Lajoie, et tel un leitmotiv, Gisèle a œuvré sans relâche à « hâter la justice en douceur dans l’amour ». Son parcours professionnel est doublé d’un engagement personnel tout entier tourné vers l’humain, d’une disponibilité pour servir l’humain en différents milieux. Elle a répondu à l’appel, maintes fois réitéré, de « porter le tablier » du service. Par ses initiatives, sa présence au monde et son attention aux autres, et aux plus petits, aux marginalisés de la société, et aux femmes reléguées aux fonctions marginales dans l’Église, cette religieuse féministe animée d’un dynamisme rassembleur a fécondé sa vie.

Titulaire d’une maîtrise en service social, Gisèle a exercé des fonctions très diversifiées, notamment : enseignante, travailleuse sociale en milieu populaire, professeure à l’École de service social de l’Université de Laval, secrétaire générale de l’Assemblée des évêques du Québec, la seule femme à exercer cette responsabilité à ce jour, présidente de la Conférence religieuse canadienne, animatrice en spiritualité ignatienne, commissaire pour une étude sur la situation des personnes en attente du statut de réfugié, rédactrice et directrice de la revue Relations.

Religieuse et militante féministe

En 1982, alors qu’elle est secrétaire générale de l’Assemblée des évêques du Québec, Gisèle a l’audace de regrouper six femmes pour fonder le réseau Femmes et Ministères engagé pour la pleine reconnaissance des ministères exercés par les femmes en Église. En 2019, le réseau est devenu Femmes et Ministères – Femmes et hommes pour l’égalité en Église. Le réseau se définit comme « un lieu de solidarité et de parole, un lieu de ressourcement et de célébration, un lieu de recherche et d’analyse, un lieu d’élaboration d’une pensée commune, un lieu de concertation en vue d’une prise de parole collective ». On reconnaît dans cette présentation du Réseau l’empreinte d’une femme qui se fait proche du terrain, mais aussi celle d’une analyste, d’une intellectuelle qui n’oublie jamais d’établir des fondements à son action, que ce soit dans ses écrits, ses conférences, ses prises de parole.

Certes, ses convictions et ses actions sont connues des autorités ecclésiales, mais ses compétences interpersonnelles, son intelligence des situations, son doigté et le respect des interlocuteurs et de l’Institution guident ses interventions, lui permettent d’éviter les confrontations inutiles avec les autorités ecclésiales et de conserver sa crédibilité. Elle sait que la justice pour les femmes en Église ne s’obtiendra pas par les revendications même les plus légitimes. Cela relèverait de l’utopie. La justice pour les femmes dans notre Église exige détermination (elle en est bien pourvue) et persévérance, un temps bien plus long que celui que dure le pèlerinage d’une vie. L’égalité qui n’est que justice exige la conversion de l’Institution. Malgré cela, Gisèle sait qu’il faut y œuvrer avec persévérance sous l’inspiration de l’Esprit.

Femme de solidarité

Religieuse et féministe, femme de réflexion et d’engagement, Gisèle est une femme aux solidarités plurielles. Solidarité qui dit concertation, consultation, gestion de conflits. Et solidarité avec chaque personne, dans une écoute attentive et le respect des cheminements. Solidarité avec l’Église, les évêques en l’occurrence, sans déroger au questionnement nécessaire de l’Institution par les diverses prises de position de Femmes et Ministères.

Femme d’engagement et d’une profonde spiritualité, elle met sur pied avec d’autres, en 2006, Antennes de Paix, associée au mouvement international Pax Christi, réseau international de volontaires qui, par le Web, travaillent à promouvoir l’éducation à une culture de la paix et de la réconciliation.

Femme libre et fidèle à elle-même

Elle possède la liberté intérieure d’être toujours elle-même, qu’elle soit devant des gens ordinaires ou devant des autorités. Quelles que soient ses prises de parole, elle demeure fidèle à elle-même, fidèle à ses amitiés, fidèle à l’Église.

Libre, par l’action de l’Esprit qui se situe dans la recherche de la vérité à révéler ou à défendre. Dans la foi et l’espérance, on trouve chez Gisèle le dynamisme nécessaire pour s’engager dans des combats pour la justice, à la défense des personnes démunies, dans la promotion de l’égalité des femmes et des hommes partout où elle a œuvré.

Femme d’écriture, témoin d’un engagement remarquable

Au cours de son parcours professionnel et de ses engagements sociaux, communautaires et religieux, Gisèle Turcot a contribué à de nombreux ouvrages collectifs, a publié brochures, études et rapports, commis des articles dans plusieurs périodiques et sur le Web, une trentaine d’éditoriaux comme directrice de la revue Relations, nombre de communications sous forme d’appels, messages et prières pour la paix ou, encore, de billets sur l’actualité, dans divers formats médiatiques. Au total, sur cinq décennies, elle aura publié, seule ou en collaboration, sous une forme ou sous une autre, plus de 200 textes. Toujours, un engagement par l’écriture a donc bellement accompagné ses engagements d’ordre social, communautaire, religieux et féministe. Elle a porté une voix unique et irremplaçable pour témoigner du souci de l’humain, dont le spirituel n’est jamais dissocié, dans une société qui y est trop souvent indifférente, voire réfractaire. Telle a été sa fidélité à elle-même et à ses racines profondes.

Animée par l’amour

L’amour de Dieu et sa fidélité au Christ se reflètent dans l’amour qu’elle porte à chaque personne. Ce qui fait d’elle une femme pacifique capable de faire avancer des causes par son respect des opinions et sa solidarité, qui se décline en sororité et fraternité. Une femme de relations et de rassemblement, une artisane de paix et de réconciliation.

Toutes ces expériences de rencontre ont été source de vie pour les êtres qui ont été écoutés, touchés par son regard, ou qui ont fréquenté ses chemins en des lieux et moments privilégiés. Pourrait-on dire une femme d’exception riche des trésors de sagesse millénaire, cette sagesse qui permet de durer malgré les vents contraires. Elle appartient aux « minorités créatrices » qui recréent des chemins de fidélité au long cours et aux couleurs de leur identité chrétienne singulière.

Espérons que son « utopie » – l’égalité – deviendra le réel de générations de femmes dans le futur. Son espérance se fonde sur le roc inébranlable de sa foi en la vie toujours porteuse de lumière et de bénédiction.

Gisèle, il te reste à poursuivre ton chemin de liberté et de solidarité exemplaire, habitée par une espérance fondée sur le roc inébranlable de ta foi en la vie toujours porteuse de lumière et de bénédiction.

Joce-Lyne Biron, secrétaire de Femmes et Ministères
Le 8 juin 2020

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Le réseau Femmes et Ministères travaille à la reconnaissance de tous les ministères exercés par des femmes dans une Église dynamique et missionnaire.
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Une réponse à Gisèle Turcot, récipiendaire d’un doctorat « honoris causa » en sciences des religions de l’Université Laval

  1. Gisèle,
    Mes plus sincères félicitations pour votre doctorat “Honoris Causa”. Je vous souhaite de voir la pleine réalisation pleine et entière de votre engagement envers les femmes et les ministères. Je me rappelle de l’enseignement de Mme Olivette Genest et des changements qui ne sont pas advenues pour les femmes au concile Vatican 2, alors que les hommes mariés gravissaient les premiers échelons des ministères. Et cela vous peinait. Nous fallait-il attendre un Vatican Ill?

    Je souhaite que nos dirigeants ecclésiaux réalisent l’urgence d’une telle ouverture, principalement en ce temps où l’arrogance envers plus de la moitié de l’humanité ne saurait être tolérée.

    En la Résurrection du Christ Jésus, ne contemplons-nous pas l’accomplissement du récit de la Genèse: Hommes et Femmes son Image, Il les créa, sous la dimension trinitaire de notre foi.

    Merci

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